Quelqu'un était passé récement, la louve le sentait. L'odeur de l'inconnu imprégnait l'air, une odeur étrangement douceâtre, une odeur qui hérissait les poils de sa crinière. Trop ancien. Trop... différent. Elle n'aimait pas cette sensation.
Il avait chassé le troupeau de cerf manifestement. Elle même était partie avec cette intention, mais en voyant le troupeau si affolé, sa curiosité l'avait détourné de son envie première. Repartant tranquillement au petit trot, elle avait rejoint la scène de la curée, où un faon mort, vidé de son sang, finissait d'agoniser. D'un coup de croc, elle avait abrégé ses souffrance. Même un loup n'aimait pas manger ses proies vivantes...
Sauf qu'elle n'avait plus faim du tout. Son odorat surdéveloppé lui traçait la scène comme si elle l'avait vu, et ça ne lui plaisait pas.
Les humains sans armes n'étaient pas sensés pouvoir rattraper un cerf à la course! Ils n'étaient pas sensés boire leur sang et mettre en fuite des mâles aussi vieux que ceux qu'elle avait remarqué à la tête du troupeau! Ces vieux cerfs aux bois impressionnant ne fuyaient même pas devant les loups... enfin les loups normaux.
Mais les bêtes sont souvent plus intelligentes que les hommes, s'ils avaient jugé préférable de fuir, cela signifiait simplement que leur agresseur n'était pas humain.
Une autre question se posait alors. Paria ou Guardian? Si le chasseur était un meurtrier, cela signifierais que tôt ou tard, sa route croiserait la sienne. Elle n'appréciait pas l'idée de sa battre avec une bestiole dont l'aura de puissance restait autant de temps après son départ. Même si les façons de tuer un loup-garou étaient incroyablement limitées, elle n'ignorait pas que, à défaut de perdre le combat ou la vie, elle risquait de ne pas adorer la scéance...
Mais la curiosité d'Athéna et son imprudence quasi-légendaire ne craignaient pas le bon sens basique d'Akuma. Sa rapidité la mettait à l'écart de ce genre de créature, aussi elle ne fit pas grand cas des récrimination de la louve pour s'approcher de la cascade, suivant tranquillement la piste.
Quelques pas plus loin, elle s'arrêta et reprit forme humaine, ses vêtements - du moins ceux qui avaient résisté à la transformation, c'est à dire pas grand chose - gémissant pour tenter de s'adapter à sa nouvelle configuration. Elle nota distraitement de se racheter un pantalon et une nouvelle veste élastique. Celle là n'avait pas apprécié le changement, et plusieurs déchirures étaient visibles. Sans compter, bien sûr, les brûlures dûes aux langues de feu que son exultation à la chasse laissait parfois échapper.
Une voix moqueuse la tira de ses pensées, et elle tourna la tête vers la lac où la créature qu'elle pistait l'observait.
Vous comptez resté caché longtemps comme cela ?
Amusée, Athéna s'avança, détaillant l'apparence ouvertement humaine de son interlocuteur. Ses sens lupins lui fournissaient une multitude de renseignement qui ne laissaient pas de doute sur la nature inhumaine du jeune homme. Si elle avait tenté d'expliquer ce qu'elle "voyait" avec le nez, elle aurait pu décrire quelque chose comme "une brume violette un peu salée, vaguement rougeâtre, avec des filaments pourpres", ce qui signifiait grosso modo qu'il sentait le sang de faon et que ses pouvoirs, quels qu'il soient, tiraient la sonnette d'alarme dans le cerveau de la louve. Sauf qu'Athéna restait désespérément humaine. Elle s'approcha tranquillement et s'assit au bord du lac, laissant ses jambes baigner dans l'eau fraiche que la cascade remuait en permanence. Ses cheveux écarlates, dénoués par la course, trempaient légerment dans le cours d'eau.
Je ne me cache pas. Vous êtes...?